Famille | Simaroubaceae |
Genre | Quassia |
Espèce | Quassia amara L. |
Noms vernaculaires :
Créole : couachi [bwa-kwachi], quinine de Cayenne.
Palikur : kwa∫βan.
Portugais : quina, quina-de-Caiena.
Origine
Le couachi, communément appelé la « Quinine de Cayenne » est un petit arbre tropical1 qui a été implanté en Guyane durant la colonisation. Malgré cette appellation, le couachi, appartenant au genre Quassia n’est pas en lien avec les arbres du genre Cinchona dont certains individus tels que le quinquina (Cinchona officinalis) sont connus pour contenir de la quinine dans leur écorce.

Aire de distribution
Cette espèce est présente dans les forêts tropicales sud-américaines et centre américaine : nord du Brésil, Venezuela, Suriname, Colombie, Argentine, Guyana1, Panama et Mexique.2
Sur les territoires français le couachi est retrouvé en Guyane française, en Martinique, en Polynésie française et en Guadeloupe. Sur le sol guyanais, son aire de répartition se concentre principalement à proximité de l’île de Cayenne et de Roura. (Inventaire National du Patrimoine Naturel – INPN)
Figure 1. Aire de répartition de Quassia Amara L. (INPN)
Itinéraire technique en Guyane
Le couachi est une plante naturalisée, c’est-à-dire qu’elle a été introduite en Guyane à l’époque coloniale autour des habitations pour soigner les esclaves atteints de paludisme. Depuis, elle se reproduit naturellement autour de ces anciennes habitations. Facile à cultiver, elle est aussi plantée dans les jardins créoles comme plante ornementale. Il n’existe pas à ce jour en Guyane une filière consacrée au Quassia Amara L3.
Pour la préparation des remèdes traditionnels, il est possible de récolter toutes les feuilles de la plante deux fois par an, sans conséquence sur son développement. L’écorce et le bois peuvent aussi être récoltés, sans porter atteinte à l’intégrité de la plante, à raison d’une fois par an. Pour cela, il faut rabattre la plante c’est-à-dire la tailler en coupant sa cime à une hauteur de 50 cm de haut. La plante repoussera facilement et produira près de 1 m de branche un an plus tard et à partir de cette branche, il sera possible de récolter l’écorce et le bois3.
Usages traditionnels
Le couachi est une espèce connue pour posséder une forte amertume et se caractérise par le goût amer présent dans toutes les parties de sa plante. Les différentes parties de la plante sont traditionnellement utilisées pour ses nombreuses vertus décrites ci-dessous.
Écorce : L’écorce est mise en macération dans du rhum pour être utilisé comme antiparasitaire, (vermifuge). Elle peut aussi être utilisée comme anti-ulcèreux2.
Bois : Au Suriname, des gobelets appelés Bitter-cups, Tonic-cups ou bien Kwasi Bita beker sont taillés directement dans le bois du couachi. Ils sont utilisés à des fins strictement médicinales pour une stimulation du tractus gastro-intestinal, pour favoriser l’amélioration de l’appétit, lutter contre la fatigue chronique ou en tant que fébrifuge. Pour cela, ces gobelets sont remplis avec un liquide tel que l’alcool ou l’eau afin de récupérer les molécules bioactives4.
Feuilles : Les feuilles sont frottées sur le corps pour un usage comme répulsif. Une décoction à partir des feuilles avec l’ajout d’écorce également permet la préparation d’un bain dans le but d’éloigner les moustiques et les parasites1 . Cette même décoction amère peut être bue à petite quantité pour soigner le paludisme et la dengue.

Figure 2. Kwasi Bita beker4
Propriétés chimiques et biologiques reconnues :
PARTIE DE PLANTES | TYPE D’EXTRAITS | MÉTABOLITES SECONDAIRES | PROPRIÉTÉS BIOLOGIQUES RECONNUES | |
Familles chimiques principales | Molécules identifiées | |||
Bois3
|
Aqueux et organiques (éthanol, dichlorométhane)5
|
Alcaloïdes indoles5
|
5-hydroxy-4-méthoxy-3-méthyl-canthin-2,6-dione,
3-méthyl-canthin-5,6-dione, 2-méthoxy-canthin-6-one, 5-hydroxy-4-méthoxy-canthin-6-one, 3-N-oxide-5-hydroxy-4-méthoxy-canthin-6-one, 1-méthoxy-carbonyl-β-carboline5 |
Antipaludique, tonique amer1, insecticide, anti-ulcéreux2,5 |
Quassinoïdes | Néoquassine,
Quassine, 18-hydroxyquassine, paraïne, Nigakilactone A, Simalikalactone D, Quassialactol2 |
|||
Écorces1,6
|
Organiques (hexane, dichlorométhane et éthanol)5 | Alcaloïdes indoles
|
Canthine-6-one,
2- méthoxycanthine-6-one7 |
Analgésique, anti-hématogène6
Insecticide2 |
Quassinoïdes | Quassine,
Néoquassine1 |
|||
Stéroïdes
|
Stigmasterol,
β-sitosterol, Campesterol6 |
|||
Feuilles5
|
Aqueux et méthanolique | Quassinoïdes | Néoquassine,
Quassine, Simalikalactone D et E, |
Antipaludique , insecticide2 , antimicrobien5 |
Toxicité
La toxicité d’un extrait de bois de couachi a été évaluée sur des rongeurs par voie orale et les résultats ont montré une absence de signe de toxicité à des doses allant de 250 à 1000 mg/kg. Cependant lorsque cet extrait a été administré par voie intrapéritonéale chez ces rongeurs, des signes de toxicité aigüe ont été relevés à la dose de 500 mg/kg et la dose de 1000 mg/kg s’est avérée létale en 24h.2
De plus, l’injection ou le traitement par voie orale d’extraits d’écorce ou de bois ont montré une activité anti-fertilité chez les rats. La quassine a été identifiée comme la molécule responsable de cette toxicité.2
Selon l’étude réalisée par Cachet et al (2009), la toxicité de certains quassinoïdes d’intérêts a été évaluée, notamment celles de la simalikalactone E extraite des feuilles du couachi, qui serait responsable de l’activité antipaludique. Les résultats révèlent que la plus forte dose de simalikalactone E (5 mg/kg/jour) induit une toxicité proche de la DL50 (soit 3 morts de rongeurs observés) alors qu’à des doses plus faibles, l’activité antupaludique est bien observée10.
Dans le contexte d’un traitement antipaludique, la dose nécessaire pour obtenir un effet curatif est proche de la dose toxique d’un analogue de la Simalikalactone D, la brucéantine2.
Anecdote
Les propriétés fébrifuges du Quassia amara ont été découvertes par un esclave surinamais surnommé « Kwasi » vers 1730 qui était un guérisseur renommé. La plante a par la suite été nommée « couachi » en son honneur par Linné2.
Sources bibliographiques
[1] Grenand, P., Moretti, C., Jacquemin, H. and Prévost, M.-F. (2004). Pharmacopées traditionnelles en Guyane. IRD Editions, Paris, France, 816 p.
[2] Houel, E. (2011). Étude de substances bioactives issues de la flore amazonienne. Thèse de doctorat, Université ds Antilles et de la Guyane, Guyane, 285 p.
[3] Pierre Silland, Expert botaniste
[4] Odonne G., Bourdy G., Beauchêne J., Houël E., Stien D., Chevolot D., Deharo.E. (2006). From Tonic-cups to Bitter-cups: Kwasi bita beker from Suriname. Determination, past and present use of an ancient galenic artefact.
[5] Odonne, G., 2010. Approche ethnopharmacologique comparative des traitements phytothérapeutiques de la leishmaniose en Amazonie. Application aux communautés Chayahuita (Pérou) et du haut et moyen Oyapock (Guyane française). Thèse de doctorat, Université des Antilles et de la Guyane, Cayenne.
[6] Toma W., Gracioso J.S., Hiruma-Lima C.A., Andrade F.D.P., Vilegas W ., Souza Brito A.R.M. (2003). Evaluation of the analgesic and antiedematogenic activities of Quassia amara bark extract. Journal of Ethnopharmacology. 85, 19–23.
[7] Commission de cosmétologie (2011) Rapport d’évaluation du risque lié à l’utilisation de la quassine dans les produits cosmétiques,. Saisine 2009BCT0016. 16 p.
[8] Houël, E., Bertani, S., Bourdy,G., Deharo, E., Jullian, V., Valentin, A., Chevalled, S., Stien, D. (2009). Quassinoid constituents of Quassia amara L. leaf herbal tea. Impact on its antimalarial activity and cytotoxicity.
[9] Cachet N., Hoakwie F., Rivaud M., Houël E., Deharo E., Bourdy G., Jullian V (2012). Picrasin K, a new quassinoid from Quassia amara L. (Simaroubaceae). Phytochemistry Letters. 5, 162–164
[10] Cachet N., Hoakwie F., Bertani S., Bourdy G., Deharo E and Stien. D. (2009). ‘Antimalarial activity of simalikalactone E, a new quassinoid from Quassia amara L. (Simaroubaceae)’. Antimicrob Agents Chemother., 53(10): 4393-8.